"S'il suffisait de s'asseoir sur
les jambes repliées, toutes les grenouilles seraient mystiques."
Vous avez besoin de la méditation, beaucoup plus que vous ne le pensez… La méditation est un état, comme l'état de veille ou le sommeil. Un état tout à fait naturel qui vous est déjà pour ainsi dire familier. Vous méditez sans le savoir mais pour méditer vraiment, il faut devenir conscient de cet état et se familiariser avec une technique qui permette de l'atteindre. |
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À l'étape actuelle, afin de ne pas s’accrocher dans les fleurs du tapis, il faut déspiritualiser cette pratique et se dire qu’elle se définit d’abord aux plans physique et psychique et non pas spirituel. Pour ceux qui souhaitent atteindre le plan spirituel, je précise qu'il existe une interaction entre les plans : en agissant aux plans physique et psychique, on rejoint nécessairement le plan spirituel. Mais il est préférable de passer par le physique : être bien dans son corps; et par le psychique : être bien dans sa tête. C’est que la démarche est soustractive. Je m’explique :
Le mental, c’est le bavardage dans la tête. Cette forme de délire ininterrompu que les Hindous appellent l’âne ivre. Pour saisir la puissance de l’obstacle à surmonter, il faut tenter, ne serait-ce qu’une minute, d’en apaiser le fonctionnement, de le suspendre un tant soit peu. C’est que le mental cherche à s'imposer : " J'ai oublié de téléphoner... Il faut que je remette ma liste, demain matin... Je n'arriverai jamais à finir cette lettre... " |
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Je médite depuis plus de vingt-cinq ans. Je m'en porte bien, mais je ne marche pas encore sur les eaux... Pour commencer à méditer, le plus difficile aura été de surmonter le mot " méditation " qui charrie un contenu culturel très lourd; et de m'y mettre une première fois... Au lieu de lire, de faire un appel urgent, de couper le gazon… Si quelqu'un était entré dans la pièce et m'avait surpris en train de méditer, j'aurais éprouvé la même gêne que si j'avais été en train de me masturber ! Le rapprochement n'est pas si farfelu: la méditation, c'est un moment où on se retire du monde, où on se replie sur soi, où on s'appartient. Un jour, tout à fait par hasard, un gourou (un authentique Swami, tout ce qu'il y a de plus initié) arrive chez moi. Alors que je rêvais, à cette époque, d'accéder à de hautes initiations, d'un chemin de Damas avec fanfares, d'une illumination genre Las Vegas, il m'enseigne cette vérité toute simple qu'un être doit chaque jour se couper du monde extérieur et se consacrer à lui-même un peu de temps, fermer les yeux, faire la paix, le silence... Tout est là ! |
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La concentration consiste à contrôler l'attention. Le plus souvent l’attention est éclatée : sensations, émotions, images, souvenirs, pensées… Il s’agit de concentrer l'attention sur un point : un seul objet de concentration ou une succession d’objets qu’il faut bien contrôler. Quant à moi, je préconise une pratique qui s’inspire (de la première étape) du Vipassana bouddhiste. Une fois la posture maîtrisée, on observe la respiration – abdominale, toujours! et avec l’accent sur l’expiration ; puis on prend conscience des sensations tactiles (température, courant d’air, position des membres, etc.); puis, on s’attache aux bruits : autour de soi et de plus en plus loin. Au cours de cette démarche, l’attention est d’abord active pour devenir passive, jusqu’à être l’attention du témoin qui observe à distance. |
Après un moment, le mental va pourtant refaire surface. Il faut alors regarder défiler les pensées, etc., comme on observerait des nuages traversant le ciel. Il s'agit de maintenir l'éveil, d'être attentif, conscient, de ne pas se laisser entraîner - envahir, submerger par le mental prenant ainsi ses distances par rapport au monde extérieur pour en venir à s'identifier à l’Observateur, à ce qui Est en chacun de nous. Mais sans vraiment chercher à l’atteindre. Plus on cherche à l’atteindre, plus il s’éloigne, mais éventuellement, dans les meilleures conditions, lorsque les obstacles du mental sont levés, le SOI – qui, somme toute, n’est jamais bien loin – finit par émerger, ne serait-ce que l’espace du vide entre une inspiration et une expiration, ou encore dans le vide entre deux pensées. Si le raisonnement que je viens de tenir vous revient pendant la méditation, c’est que vous n’y êtes pas. Où ça ? Au-delà du mental. Sans pensées, sans émotions... Dans le vide. |
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Mais la méditation n'a besoin ni de raison ni de but. Alan WATTS compare la méditation à la musique : quand on fait de la musique, ce n'est pas pour atteindre un certain point qui serait, par exemple, la fin du morceau. Si tel était le but de la musique, le meilleur exécutant serait le plus rapide... Quand nous faisons de la musique, c'est la musique qui est sa propre fin. Il en va de même pour la méditation qui est une façon de se plonger dans le présent; de jouir d'un éternel présent. Car la méditation doit être une occasion de joie.
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Pour des gens comme vous et moi, la méditation doit plutôt s’entendre comme une ascèse physique et psychique, qui aide à se prendre en main. C'est une pratique que je recommande à toute personne qui estime qu'une amélioration de 10 à 20% de son fonctionnement mérite de s’y investir. Les autres, ceux qui attendent un miracle, doivent rester au Prozac... Prozac®: thérapeutique à visée antidépressive qui a été surnommé "pilule du bonheur". |
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Source du texte: http://radio-canada.ca/par4/ |